12 mars 1989, un informaticien britannique du CERN (Organisation européenne pour la recherche nucléaire), monsieur Tim Berners-Lee, rédige un projet qui va bouleverser l’Internet déjà en place depuis la fin des années 60. Le World Wide Web a transformé l’utilisation d’Internet et a permis de démocratiser le réseau dans le monde entier dans les années 90. C’est au milieu de cette décennie que je me suis initié à Internet et au Web, époque qui est à la base de ma carrière professionnelle en informatique. Le Web a changé ma vie… et la vôtre ?
En 2019, les milléniaux utilisent Internet du matin au soir sûrement sans connaître la véritable histoire du réseau qui a mené à l’interconnectivité des objets qui les entourent. Les plus vieux comme moi ont vécu l’évolution d’Internet et se souviennent des balbutiements du World Wide Web qui ont mené à la naissance d’une ère hyper connectée.
Parmi toutes les personnes sur la planète qui utilisent Internet aujourd’hui, qui n’atterrit pas au moins une fois dans la journée, peu importe la manière, sur un site Web pour s’informer et trouver de l’information sur n’importe quel sujet ?
Ce besoin de savoir et de connaissances, lui, n’a pas changé depuis la publication du projet de monsieur Tim Berners-Lee le 12 mars 1989, date que l’on considère comme étant l’acte de naissance du World Wide Web. L’idée primaire de son projet était d’échanger et de partager de l’information plus facilement et rapidement avec ses collaborateurs.
L’Organisation européenne pour la recherche nucléaire (CERN), dont faisait partie monsieur Berners-Lee, rassemblait une communauté de scientifiques venant d’universités réparties dans 80 pays du monde. Afin d’améliorer l’échange et la communication entre eux, l’informaticien a présenté un projet surréaliste (à télécharger sur mon Dropbox) qui décrivait exactement ce qu’est le Web, soit une « toile » où chacun peut « naviguer » de contenu en contenu.
Il a alors imaginé un principe où les ordinateurs des scientifiques seraient reliés entre eux via les réseaux informatiques pour former un puissant système d’information auquel ils auraient tous accès, et ce, gratuitement.
Bien sûr, Internet existait déjà depuis les années 60. Il était possible, par exemple, de s’envoyer des courriels par le réseau depuis 1972. Mais il n’existait pas encore d’interface visuelle pour consulter simplement de l’information partagée par tout le monde.
C’est avec l’aide de collaborateurs informaticiens que Tim Berners-Lee développe son projet sur un ordinateur NeXT fabriqué par une société américaine fondée par un certain Steve Jobs (Apple). Au cours de son processus, il conçoit plusieurs concepts, dont celui du « protocole HTTP » (protocole de transfert hypertexte) et le « langage HTML » qui est toujours utilisé aujourd’hui pour concevoir les pages Web, dont celle que vous lisez présentement.
Au mois de décembre 1990, l’informaticien rend opérationnels le premier serveur et navigateur Web (baptisé alors « WorldWideWeb ») à partir de l’ordinateur NeXT sur lequel il a développé son projet. Sur ce serveur se trouve le tout premier site Web de l’histoire. On peut toujours accéder à ce site Web par son adresse originale : http://info.cern.ch/hypertext/WWW/TheProject.html.
Parce que son navigateur Web ne fonctionne que sur la plateforme des ordinateurs NeXT accessible seulement à quelques utilisateurs, Tim Berners-Lee conçoit un nouveau navigateur en « mode ligne » pouvant fonctionner sur n’importe quel système. Le CERN a mis en ligne un simulateur qui permet aujourd’hui de reproduire l’utilisation de ce navigateur qui ne pouvait afficher que du texte.
Le 6 août 1991 marque une autre date importante dans l’histoire du Web. Son créateur publie un message sur Usenet, système de forums en réseau, pour présenter son projet. Rapidement, le message se passe et l’intérêt pour le Web, utilisé jusqu’alors par des organisations comme le CERN, se propage partout dans le monde.
Au cours de la même année, en décembre 1991, le premier serveur Web aux États-Unis est mis en ligne au Centre de l’accélérateur linéaire de Stanford (SLAC), en Californie. Alors que plusieurs développeurs conçoivent des navigateurs Web suite à un appel lancé par Tim Berners-Lee sur Internet, une équipe du centre de recherches américain NCSA publie en 1993 le navigateur Web « Mosaic ». Ce navigateur sera assurément celui qui aura rendu le Web populaire.
Finalement, c’est en 1994 que le Web prend véritablement son envol et connaît une croissance en popularité exponentielle. Tous les médias parlent abondamment du Web. Une première conférence internationale sur le World Wide Web se tient au CERN en mai et attire près de 400 utilisateurs et développeurs. L’événement est considéré ni plus ni moins comme le « Woodstock du Web ».
À la fin de l’année 1994, le Web compte 10 000 serveurs, dont 2 000 à usage commercial, et 10 millions d’utilisateurs. Son créateur, Tim Berners-Lee, quittera le CERN durant cette période. Il fondera alors un organisme de standardisation du Web toujours aussi important aujourd’hui, le World Wide Web Consortium (connu par les webmestres comme moi par l’acronyme « W3C »).
Web 2.0, la suite du World Wide Web
Je pense important de parler brièvement de ce que l’on appelle le « Web 2.0 » qui a pris naissance au début des années 2000. Cela vous dit quelque chose ? Si la réponse est non, je n’ai alors qu’à vous donner quelques mots que vous connaissez bien : réseaux sociaux, Facebook, Twitter, Instagram, YouTube, blogue…
Le Web 2.0, c’est en fait le « Web social », une évolution du World Wide Web de Tim Berners-Lee. Alors que celui-ci était statique et linéaire (il ne proposait que de l’information à consulter par les internautes), le Web 2.0 se veut participatif. L’internaute ne fait plus que consommer l’information, il la produit également.
On doit le terme Web 2.0 à Dale Dougherty, l’un des pionniers du Web, qui l’a proposé pour la première fois lors d’une conférence en 2004. Le terme a ensuite été formalisé et popularisé par Tim O’Reilly, entrepreneur et fondateur d’une maison d’édition américaine spécialisée dans l’informatique. Ce dernier a décrit le concept du Web 2.0 en 2005 dans un article sur son site Internet (en anglais). Ce texte est devenu une référence fondatrice de cette nouvelle ère du Web.
L’évolution du Web n’en reste pas là. En 2009, O’Reilly a une fois de plus évoqué un nouveau terme, le « Web Squared » (ou « Web au carré »). Certains parleront du « Web des données », c’est la même chose. Il s’agit ici de transposer le Web dans le monde réel par la collecte des données d’un utilisateur et la connexion de celles-ci à des outils qui vont lui fournir des informations.
Quelques exemples du Web² sont la reconnaissance vocale et musicale (Shazam notamment), la réalité augmentée, le contenu affiché en fonction des lieux à proximité, les codes QR qui affichent une information ou dirigent vers un site Web lorsqu’ils sont numérisés, etc. Ce n’est là qu’une étape intermédiaire vers ce qui sera le Web 3.0…
Les inquiétudes de Tim Berners-Lee
En ce jour du 30e anniversaire du Web, son créateur a souligné l’événement en publiant une lettre ouverte où il exprime ses inquiétudes face à ce qu’est devenue son invention et ses problèmes actuels. Il parle notamment de la propagation de la désinformation, des comportements criminels et le harcèlement en ligne. Radio-Canada a publié un article intéressant à ce sujet.
Ma petite histoire personnelle avec le monde du Web…
Mon premier contact avec un ordinateur remonte à l’école primaire dans les années 80. Mon souvenir de ce moment est quelque peu flou, mais je me rappelle d’avoir entre les mains des feuilles où étaient écrites des commandes informatiques qui, une fois entrées dans l’ordinateur, permettaient au final de faire avancer un robot à l’écran. Jadis, tout se passait en ligne de commande et nous n’avions pas les nombreuses interfaces graphiques que connaissent les jeunes aujourd’hui.
Ce n’est qu’en 1995, durant la deuxième année de ma formation professionnelle en dessin industriel, que j’ai véritablement travaillé pour la première fois avec un ordinateur. C’est précisément cette année-là que j’ai eu un gros coup de cœur pour l’informatique qui est devenu une passion. À la fin de mes études, je me suis procuré un vieil ordinateur pour la maison où j’ai appris par moi-même les rudiments de l’informatique.
Après avoir côtoyé un certain temps les cafés Internet qui chargeaient l’utilisation à l’heure, j’ai rapidement voulu connecter mon ordinateur de la maison à l’Internet.
Je me rappelle de ces fois où ma mère avec qui j’habitais encore s’exaspérait que j’utilise sa ligne téléphonique pour faire des recherches d’informations sur des sites Internet que je trouvais notamment sur « La Toile du Québec », un incontournable du Web québécois lancé en 1995 et fermé en 2014.
L’accès au Web n’était pas très rapide à l’époque. L’arrivée d’un modem câble dans la maison a tout bouleversé. Je trouvais plus d’informations plus rapidement. Naviguer sur le Web m’a aussi donné envie de créer mes propres sites. Je consacrais tout mon temps libre à cette passion, souvent au détriment de ma santé et de mes relations sociales. Cela a été le début de ma cyberdépendance, une maladie qui est aujourd’hui reconnue et qui touche particulièrement de plus en plus de jeunes hyper connectés.
Le Web a trente ans, je navigue sur celui-ci depuis plus de vingt ans. J’ai de bons souvenirs et une bonne carrière professionnelle grâce à lui. Suite aux événements de l’été dernier, je suis moins assoiffé d’informations et de communication par les réseaux sociaux. Mais le Web fait partie intégrante de mon quotidien. J’espère que l’on saura se donner les moyens pour que son évolution ne dérive pas vers un côté obscur qui finira par nous noyer !